Facebook
Twitter
LinkedIn

L' »économie positive » pour réconcilier croissance et environnement

Maximilien Rouer, président du cabinet BeCitizen et inventeur de l’économie positiveTM, nous propose un avis d’expert sur la mise en pratique de ce modèle qui allie croissance économique et restauration de l’environnement.

Aujourd’hui, la plupart des acteurs sont dans une dynamique de préservation de l’environnement, ce qui est déjà bien. Et il serait tentant de s’en contenter. Mais étant donné le niveau de dégradation du climat et des écosystèmes, il faut aller plus loin : il faut le restaurer. La restauration implique d’avoir une autre vision de l’économie, plus ambitieuse : innover dans la productivité des ressources comme dans leur revalorisation, de telle sorte que le bilan net de la croissance aboutisse à un stockage de carbone, à une production nette d’énergie et à une production/dépollution nette d’eau, de sols et de matières premières ainsi qu’à la restauration de la biodiversité.

L’économie positiveTM pour quels secteurs ?

Il existe trois états à l’économie (négative, neutre et positive) comme il existe trois états à la matière (solide, liquide et gazeuse). Cette structuration émergente de l’économie est récente (2005), en conséquence les activités économiques de 2012 ont presque toujours un impact négatif sur l’environnement, c’est-à-dire des émissions de CO2, une consommation nette d’énergie et de matières premières, la pollution des sols, de l’eau et de l’air.

L' »économie positive » s’applique donc à tous les secteurs aussi bien les transports que le bâtiment, l’agriculture, l’énergie ou encore les biens de consommation. Elle désectorise l’environnement. Elle le passe d’une logique sectorielle à une logique mainstream et fait évoluer nos repères scientifiques, technologiques, économiques et financiers. Au point de questionner la vulnérabilité des modèles d’affaires, des produits et des services existants. Nous parlerons ici d’un exemple de travail effectué sur le bilan santé, via les produits alimentaires.

La toxicité chronique des aliments de tous les jours

Il y a quelques années, les produits alimentaires étaient constitués exclusivement de matières premières agricoles. Ce n’est plus le cas, des centaines, des milliers de matières issues de la chimie s’y sont substituées en partie, sous la forme de liants, de colorants, de conservateurs, d’exhausteurs de goûts, d’épaississants ou encore d’arômes. La liste des ingrédients de nos produits de consommation est passée, à notre insu, de quelques lignes à une vingtaine de lignes.

Pour quelle raison ? Pour réduire les coûts. Le consommateur qui jusqu’ici en tirait un bénéfice, commence à s’inquiéter des conséquences de ces substitutions sur sa santé, à juste titre. Une multitude de ces produits chimiques sont reconnus comme étant toxiques (cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, perturbateurs hormonaux et neurodégénératifs) ou font encore l’objet de controverses sociétales.

En mai 2011, les députés ont voté une proposition de loi visant à interdire les phtalates, alkyphénols et parabènes. Quant au Sénat, il a adopté une loi à l’automne 2011, visant l’interdiction de l’utilisation du bisphénol A dans les biberons. Le grand précédent non alimentaire sur le sujet de la toxicité chronique est l’amiante, dont les premiers morts cliniques ont été diagnostiqués en Angleterre en 1898. Sa première interdiction vient des Etats-Unis. En France elle date seulement de 1996.

La nouvelle composition des produits alimentaires pourrait donc rendre malade en raison de leur toxicité chronique. Cette toxicité est un sujet émergent illustré par l’accumulation de micro voire pico doses toxiques (illustré récemment dans les médias avec les PCB, pesticides, métaux lourds…) dans l’organisme pendant des années.

La grande distribution peut aider à revenir à des produits sains

Les achats de « marques distributeurs » (MDD) par les français ne cessent d’augmenter. En janvier 2012, ils représentent 35% des ventes de la grande distribution. Etant donnée l’étonnante composition de certains produits, les distributeurs font face à une nouvelle responsabilité. Cette responsabilité tient, d’une part, à la quantité des produits vendus et, d’autre part, à leur diversité. Aujourd’hui, une famille peut en effet se nourrir du petit déjeuner au dîner avec une seule marque : celle du distributeur.

Cette responsabilité grandissante couplée à un besoin de différenciation a incité Système U, par exemple, à retrouver la qualité intrinsèque de ses produits. Les ingrédients controversés (plus d’une centaine dont l’aspartame, bisphénol A, huile de palme …) seront progressivement éliminés afin de retrouver un goût authentique et éliminer les risques de santé publique. Le produit doit redevenir « sain ».

Ce type de démarche nécessite de la part des enseignes un changement de positionnement radical, souvent impulsé au plus au niveau de l’entreprise. Le travail doit aboutir à des produits respectueux de l’environnement, qualitatifs d’un point de vue nutritionnel et gustatif. La réconciliation entre environnement, santé et croissance constitue, déjà aujourd’hui, un avantage concurrentiel pour certaines entreprises.

Catégories